II. Après guerre : recycleurs ventraux O2 en France

Allez hop un petit teaser pour la suite de la saga .... nous avions parlé a la fin de l'épisode 1 a quel point les premiers plongeurs de combat Français étaient mal équipés .... mais tout ceci va changer rapidement avec une machine Française qui restera dans l'histoire des recycleurs ventraux : L'Oxygers ....

mais je laisserai la parole a notre spécialiste non sans vous donner une photo sous forme de teaser ......

ben dites donc
je dois dire que je ne connaissais que de loin ces recycleurs et leur histoire
ben je dois dire que j en reste sans voix ...
j ai lu couillu, je crois que c est le moins que l on puisse dire !
merci a vous les experts O²
c est chouette a vous de nous ouvrir votre bibliotheque
vincent

tik140 a écrit:ben dites donc
je dois dire que je ne connaissais que de loin ces recycleurs et leur histoire
ben je dois dire que j en reste sans voie ...
j ai lu couillu, je crois que c est le moins que l on puisse dire !
merci a vous les experts O²
c est chouette a vous de nous ouvrir votre bibliotheque
vincent

Ravi de voir que le début de cette saga puisse plaire, j'espère que nous aurons plein de choses a vous faire découvrir, et puis pour vous les plongeurs si un jour l'essai vous tente : manifestez vous !
tu as raison de souligner que ces machines sont souvent délaissées par les plongeurs, pas tellement étonnant leur usage "exclusif" en font une bonne illustration pour les cours théoriques sur la plongée ... et puis on les oublie aussi vite qu'on les présente
puisse cette saga les replacer a leur juste valeur dans l’extraordinaire conquête des fonds marins

Les photos sont impressionnantes, à la limite elles font peur !

Puisque ces photos vous plaisent et pour agrémenter un peu le teaser en voici quelques unes, que Ebourzeix ne manquera pas de commenter :

on commence avec une superbe photo de Dumas en Pirelli lourd (donc matériel période seconde guerre mondiale mais photo prise après 1945 (1951) .... c'est de la récup : "prise de guerre" !)
on pourra aussi remarquer la Muta di Gomma Pirelli : combinaison en caoutchouc porté avec des sous vêtements en laine en dessous : avant l'invention du néoprène mousse (d'ou les curieux plis) ces combinaisons étaient très fragiles et fines



bidouillage encore avant l'arrivée de la machine Française : une modification de recycleur Davis (voir chapitre I) datant de 1951



un prototype de L'oxygers : premier recycleur a circuit fermé Français



un Oxygers 1954



a gauche modèle Fenzy 54 a droite prototype Oxygers 57



le premier prototype (a droite) et le modèle 54 cote a cote



je laisse Ebourzeix vous raconter la fabuleuse histoire de la machine

faut le suivre, Jean-Mi ! il court, il court

L'Oxygers est lié à l'histoire du GERS, département de recherche qui sera une véritable nurserie de projets géniaux dans l'immédiat l'Après-Guerre. Je citerai pour ma part la conception de 2 recycleurs qui vont faire date: l'Oxygers et le DC55.

Le premier est un fermé destiné aux nageurs de combat, le second un pSCR pour les démineurs (pSCR = semi-fermé à la demande). On y reviendra (faut pas tout dire d'un coup).

L'Oxygers a été construit par et en collaboration avec Fenzy. Nous avons ici un industriel qui a connu 14-18 et la Guerre des Gaz avec donc une expérience certaine dans le domaine du matériel de protection respiratoire.


L'oxygers est radicalement différent des recycleurs italiens de type ARO.

Il est de type cyclique, c-a-d- que la circulation des gaz fait une boucle (à la différence des pendulaires où tout passe par le même tuyau). Le Castoro est peu ou prou organisé de la même manière.


La machine est conçue autour d'un carénage noir en laiton recouvert d'une couche de fibre de verre qui abrite un grand filtre radial et partiellement le poumon (une jupe souple en PVC renforcé protège la partie haute).


Très compact et extrêmement hydrodynamique, il s'agit à ne point en douter du plus performant recycleur O2 jamais conçu. Je ne dis pas ça pour faire plaisir et hisser le drapeau bleu-blanc-rouge mais c'est ainsi.

je rajouterai a cette excellente synthèse, pour les éventuels pinailleurs quelques variantes de ce matériel d’exception (puisqu'il a été en service dans la Marine nationale pendant pas loin de 50 ans !)

En 1954, le pharmacien-chimiste Perrimond-Trouchet et le LV Alinat du GERS (Groupement d'Étude et de Recherches Sous-marines) mettent au point un premier prototype, l'OXYGERS (OXYgène et GERS).
Peu à peu, diverses améliorations apparaissent (cartouche de chaux plus importante, carénage avec jupe en caoutchouc armé) pour aboutir finalement à l'Oxygers 54, d'abord fabriqué par la société Fenzy en 200 exemplaires.

L'Oxygers 54 est ensuite modifié par le GERS pour le corps amphibie de la Marine. Les cornes sont supprimées, le volume de la cartouche est réduit et le trou de remplissage de chaux sodée est déplacé au centre.
Ces changements aboutissent ainsi au prototype Oxygers 57 qui présente une jupe de carénage en toile caoutchouc avec branchement des tuyaux annelés en arrière de ce plastron souple. Le volume du sac et de la cartouche est plus limité, améliorant ainsi les problèmes liés à une trop grande flottabilité.

Modernisation: L'Oxygers 57/97 : L'Oxygers a subi en 1997 une modernisation qui a principalement porté sur l'environnement de l'appareil et n'a pas modifié sont principe général, démontrant une nouvelle fois les capacité de cet appareil. Il etait commercialisé par Aqualung

Oxygers 54 et 57



photo de l'Oxygers 57/97

Quelques vues en détail...

détendeur, ultra-simple






Une molette sur la coque permet de régler la dureté du clapet de ce qui tient lieu de 2ème étage. Plus bas, on distingue le bouchon de remplissage du filtre.


Comme l'a dit Jean-Mi, l'Oxygers a connu dans sa longue vie une étape de modernisation en 1997.

Les machines qui en sont sorties sont nommées Oxygers 57/97. L'effort porta principalement sur un nouvel embout plus moderne en remplacement du GODEL, un poumon et des tuyaux plus gros.


A utiliser, l'Oxygers est un vrai bonheur: compact et extrêmement hydrodynamique.


Pour les BDistes, il apparaît dans cet album qui se passe à l'époque du grand Charles




L'Oxygers a été depuis remplacé par le Frogs, machine certainement plus polyvalente mais encombrante et lourde. Et moche

Au niveau des accessoires, On voit apparaître du matériel spécifique comme un profondimètre 0-16m


et un joli masque, toujours en activité.

ebourzeix a écrit:

Très compact et extrêmement hydrodynamique, il s'agit à ne point en douter du plus performant recycleur O2 jamais conçu. Je ne dis pas ça pour faire plaisir et hisser le drapeau bleu-blanc-rouge mais c'est ainsi.

tu pourrais peut être nous relater ici ton expérience de plongée sur cette machine ? je pense que cela en intéresserai plus d'un

En fait, je n'ai pas tellement d'expérience. Un essai avec une machine préparée de main de maître par un spécialiste et le dernier où j'ai noyé le filtre D'ailleurs, bonjour pour enlever la chaux !


La première plongée fut parfaite. Par rapport au Castoro, l'Oxygers injecte à la demande. Il n'y a rien à faire de ce côté-là.

Descente tranquille et stabilisation à -6m. J'étais un peu stressé car je me devais d'assurer et pas trop remuer la vase...

Ensuite j'ai oublié la machine. Le volume contenu du poumon t'évite à la différence d'un ARO d'avoir les joues de hamster.


Détail rigolo, c'est probablement l'unique recycleur qui plaît aux filles. A une copine qui l'avait essayé, il lui a rappelé la fois où elle était enceinte

En passant pour ceux qui aiment les belles photos et la Petite Histoire, voici un ouvrage in-dis-pen-sa-ble:

La plongée autonome, le temps des pionniers, Claude ROBINET - Luc GUILLOU, Ed. MARINES, 1999

encore quelques photos pour illustrer l'Oxygers :

photo datant des années 80 vous remarquerez les Tudor submariner au poignet


une photo beaucoup plus ancienne des années 50 remarquerez cette fois ci la Rolex Submariner sans épaulements


une image de 1960 sur le porte avions Dixmude , plongeurs de combat en tenue Pirelli Muta di Gomma, recycleurs Oxygers, fenzy noire speciale MN, ceinture de plomb GERS et couteau Spirotechnique la montre est probablement une Blancpain Fifty Fathom


une photo des années 70


et une des années 90


pas beaucoup de changement dans l'équipement .... si quand même : la montre

Toujours très intéressant merci.
Cependant je me demandais pourquoi tout au long du développement des recycleurs, la position ventrale est privilégiée, quels sont les avantages par rapport à un recycleur placé sur le dos ? (Encombrement ?)

luc IV a écrit:Toujours très intéressant merci.
Cependant je me demandais pourquoi tout au long du développement des recycleurs, la position ventrale est privilégiée, quels sont les avantages par rapport à un recycleur placé sur le dos ? (Encombrement ?)

pour un recycleur O2 en utilisation militaire ça a pas mal d’intérêts :

confort respiratoire : le faux poumon étant placé plus bas que les poumons du plongeur la pression hydrostatique y est légèrement plus importante l'inspiration de gaz est donc facilitée
confort de manipulation : les recycleurs O2 manuels nécessitent une injection de gaz, la bouteille devant facilite la manipulation et même pour les recycleurs en injection auto il est plus facile de pouvoir ouvrir / fermer la bouteille si elle est devant
compacité : tuyaux plus courts, harnais plus simple
dos dégagé : le nageur peut porter des charges dans le dos
compatible parachutage : et oui un parachute sur le ventre c'est pas idéal
centre de gravité plus bas : équilibre dans l'eau plus facile

la position privilégiée d'un recycleur O2 est bien sur le ventre: et je dirai même cela serai le cas de tous les scaphandres .... si ils étaient aussi petit que les recycleurs O2

afin de complèter le tour d'horizon sur ces recycleurs ventraux Français voici encore quelques photos

un "petit frère" de l'Oxygers : le "mini oxy" de 1964 : l'idée était de faire une machine de petite dimension pour immersions courtes (1 heure max), l'appareil pèse 3 kg , de nombreux problèmes ont provoqué son abandon (épuration insuffisante du CO2 et respiration de gaz trop chaux du a l'exothermie de la chaux)





notons que le GERS fut aussi en charge de tester de nombreux prototypes proposés a la marine Française par différents fabricants

ici un "poumondeau ventral" (notez le nom et traduisez le en Anglais .... aqualung )



ou ici le Le Masson fabriqué par Piel

On dirait un gadget de James Bond pour le dernier!

Qu'est-ce qui explique que des recycleurs soient si différents les uns des autres? La position du poumon? Des bouteilles? Le matériel utilisé?
On a pourtant l'impression que c'est le même appareil, à peu de choses près. De plus, si le système est si simple, tous ces appareils devraient être similaires et fiables, non?

On dirait un gadget de James Bond pour le dernier!

moi aussi j'adore le look du dernier ... mais un capot poli miroir pour un usage militaire

Qu'est-ce qui explique que des recycleurs soient si différents les uns des autres? La position du poumon? Des bouteilles? Le matériel utilisé?

si tu veux parler de l'aspect externe disons que l'on peut distinguer 2 grandes catégories de recycleurs ventraux : les carénés et les non carénés , l’avantage d'un capot étant bien sur de proposer une meilleure protection ... mais plus de poids
tu as vu que sur le principe, nous avons quand même 2 grandes familles : les cycliques et les pendulaires : la place du filtre n'est pas la même dans les deux cas, cela influe sur l'aspect extérieur de la machine
si on parle des ventraux et bien tout les faux poumons sont sur le ... ventre et les différences sont la nettement plus réduites (alors que les CCR modernes ont eux beaucoup de différence sur la place des poumons : dorsal, épaules ...)
pour les bouteilles la majorité des ventraux utilisent 1 bouteille d'O2 de 2 litre de contenance, mais les aspects , matériaux et formes peuvent varier (acier, alu voir même composite comme sur le Crabe)

On a pourtant l'impression que c'est le même appareil, à peu de choses près. De plus, si le système est si simple, tous ces appareils devraient être similaires et fiables, non?

tu verras que plus on va avancer dans l'historique de ces machines plus elle vont se complexifier (injection automatique ....) et finalement un tout bête ARO ou un Dräger LAR ou un Crabe sont quand même assez différent ne serai ce que par leur poids et encombrement, mais effectivement le principe de base reste extrêmement simple comparé a un CCR multigaz sportif, et donc très fiable

Merci à tous pour ces documents très intéressants

Merci pour toutes ces infos!
J'me régale!

Merci beaucoup pour cette nouvelle saga c'est passionnant

Ben

oui moi aussi
je suis a 100% dans la découverte la ...
merci a vous
vincent

Merci pour toutes ces informations.

En lisant hier l'ouvrage de Cousteau et Diolé "Compagnons de plongée" je suis tombé sur cette image qui colle au sujet :


Oxygers également ?

Petite citation au passage : "Cet équipement à oxygène en circuit fermé a, en effet, l'avantage d'être silencieux dans l'eau, et le souffle du plongeur ne monte pas vers la surface en colonne de bulles, ce qui évite d'effrayer les animaux. Il est aussi plus léger et plus facile à transporter dans un oumiak que les bouteilles d'air comprimé. Enfin, dans les mers glaciales, ces appareils offrent un avantage supplémentaire : le plongeur respire de l'oxygène enfermé dans le même circuit, et qui a ainsi le temps de se réchauffer à la chaleur des poumons. Ce gaz paraît donc beaucoup moins froid que l'air comprimé des bouteilles.
En revanche, l'oxygène sous pression ne permet pas de descendre au-delà de 8 à 10 mètres de fond, sous peine d'accident grave : perte de conscience, nausée, etc."

8 a 10 mètres a l'oxy pur : autres temps ....

merci pour le document

Merci pour la photo

Oxygers 57, embouts Godel...une autre époque.

une vidéo de L'Oxygers en action

Ca doit être sympa une balade avec leur petit engin sous-marin

7h de nage pour retrouver leur propulseur !!!

cette saga est vraiment extraordinaire de richesse sur les écrits et les documents

du travail de fou on adore

Mais tous les deux vous êtes vraiment des grands malades

micromeca a écrit:
7h de nage pour retrouver leur propulseur !!!

Ca me parait effectivement énorme.... Pour une mission, il faudrait alors emporter plusieurs reclycleurs, non?

Nostromo a écrit:

Ca me parait effectivement énorme.... Pour une mission, il faudrait alors emporter plusieurs reclycleurs, non?

et la nage en surface, c'est pour les comiques
j'en foutrai moi 10 tours de carrière